Les photos sont terribles. Choquantes. Sur une plage de la région de Naples, deux cadavres recouverts de serviettes de bain et à quelques mètres, des vacanciers qui continuent à pique-niquer ou à bronzer; ou encore, des hommes qui emportent un cercueil devant des femmes allongées sur leurs transats...
Et les doutes subsistent sur la réalité de ce que montrent les photos, car selon la focale (grand angle, zoom ) qui été utilisée, celle-ci peuvent être trompeuses, en donnant l'impression que la distance entre les vacanciers est plus faible qu'elle ne l'est en réalité, en écrasant la perspective...
Mais que c'est-il passé ?
La plage de Torregaveta est bondée en ce début de week-end. Il fait très beau mais la mer est agitée (force 2). Quatre gamines roms, qui vivent dans le camp de Secondigliano, le plus important d'Italie, sont venues vendre des objets de pacotille.
Accablées de chaleur, les fillettes décident de se baigner. Elles laissent leur sacs à dos pleins de bijoux et autres bricoles sur la plage et plongent tout habillées. "Elles sont seules, il n'y a personne pour leur dire qu'il ne faut pas se baigner juste après avoir mangé, quand la mer est agitée et que l'on ne sait pas nager".
Les courants sont forts. Ils emportent les gamines qui se mettent à crier. Leurs hurlements parviennent jusqu'à la plage. Deux baigneurs se précipitent pour leur porter secours , une femme prévient les secours avec son portable.
Les nageurs parviennent à ramener l'adolescente de 15 ans et la fillette de huit ans . Mais Violeta et Cristina Ebrahmovich, âgées de 11 et 12 ans, sont emportées au loin par une grosse vague. Lorsqu'arrivent secours et pompiers, ils parviennent à récupérer les deux sœurs mais il est trop tard: impossible de les réanimer. Elles meurent noyées.
Les photos montrent ce qui s'est passé après: l'indifférence, la légèreté à côté de la mort, la collision entre la plage et le cercueil. "Les corps sans vie reposaient sur le sable et, à quelques mètres de là, les vacanciers continuaient à pique-niquer et à prendre le soleil, et nous avons récupéré les corps dans l'indifférence générale.", rapporte l'un des secouristes.
L'émotion est évidemment très forte dans la communauté Rom.
Il est indeniable que depuis quelques années, il existe une montée de la xénophobie en Italie grandissante, et notamment envers les Roms, dopés par la campagne lancée par le gouvernement Berlusconi contre cette communauté.
Le gouvernement italien a récemment décidé de recenser et de relever les empreintes de tous les Roms, âgés de plus de 14 ans. Et c'est justement dans le camp de Secondiglano, là où vivaient les deux fillettes, qu'a commencé ce recensement très contesté de la communauté la plus importante en italie.
Ce qui s'est passé samedi à Torregaveta, ne relève pas essentiellement du sentiment de racisme : c'est surtout une preuve de la montée de l'indifférence et de l'individualisme, mais surtout, une manifestation d'inhumanité.