Citoyenneté et Fraternité : Derniers remparts contre la précarité

Billet


La lutte contre l'exclusion mérite et nécessite un vrai débat de fond

Des phases primordiales pour les plus destructurés d’entre nous sont nécessaires.

Par l’action et le terrain que je côtoie avec mes équipes de bénévoles depuis plus de 17 années, je suis à mêmes de vous exposer une analyse et plusieurs propositions, humainement et économiquement réalisables.

Récemment, le chef de l’état a souhaité instaurer à terme l’obligation pour les pouvoirs publics de fournir un logement à chaque Français.

Mais dans les faits, cette mesure sera difficile à appliquer.

D’un seul coup, d’un seul, à l’orée des élections présidentielles et d’une surmédiatisation, habituellement cyclothymique et annuelle dans la période hivernale, des mesures ont été prises à la va vite pour rentrer dans les cordes des échéances.

Ce droit au logement opposable n’est indubitablement pas la solution miracle pour les 3 millions de mal logés en France ?

Un tel outil doit permettre à une personne privée de toit de poursuivre les pouvoirs publics devant un tribunal en cas d’impasse dans ses démarches.

En devenant un droit opposable, le logement n’est donc plus seulement un objectif, mais une obligation pour les collectivités, avec des sanctions à la clé.

Mais qui punir alors en cas de litige :

la Ville, l’agglomération, le Département ou l’Etat ?

Déclaré coupable par la justice, l'Etat devra alors verser une indemnisation au plaignant.

Mais là encore, l’excès de loi cataclysme les champs d’action

L'inflation législative est toujours un danger et, en France, elle n'est pas maîtrisée.

Trop de lois pénales tuent le droit, car leur multiplication détruit la considération que l'on doit avoir pour elles, et par conséquent, sur les facultés d’actions de nos concitoyens.

La loi, c’est l’occasion d’inscrire dans les faits des choix politiques.

C’est un élément essentiel de la démocratie. La loi est nécessaire et cela, nul ne le conteste.

Cela étant, la France souffre certainement d’une trop grande confiance dans la loi.

Un problème, une loi… Un autre problème, une autre loi……


Conséquence, le droit français, c’est souvent un amalgame de lois de circonstances, de lois qui changent au rythme des journaux télévisés.

A voir le Parlement se transformer progressivement en machine à faire des lois, on se prend à penser que produire du papier est devenu la manière habituelle de répondre, à moindre coût, aux sollicitations de l'actualité.

Traiter sérieusement les questions de fond demandent, en effet, du temps et des moyens, contraintes peu compatibles avec le tempo médiatique et le déficit budgétaire. En ces temps où l'annonce vaut l'action, l'ouverture du théâtre parlementaire lors d'une conférence de presse suffit amplement.

Paradoxalement d'ailleurs, l'urgence demandée par le gouvernement sur un texte ne l'engage pas plus que cela à en accélérer la mise en application.

Déjà, dans la constitution française et son préambule de 1946, le dixième amendement stipule que la Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.

La non-assistance à personne en danger est le fait que quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours, peut être punis par cette même loi.

Enfin et surtout, la loi Besson , visant à la mise en oeuvre du droit au logement, qui à pour objet de garantir le droit au logement, dans cette philosophie qui constitue un devoir de solidarité pour l'ensemble de la nation.

Toutes personnes ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l'inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d'existence, a droit à une aide de la collectivité, dans les conditions fixées par la présente loi, pour accéder à un logement décent et indépendant ou s'y maintenir. Cette application de la loi SRU (solidarité et renouvellement urbain) n’a jamais été réellement appliquée car le but de toute loi et d’être contourné, singulièrement par ceux, parfois, qui sont les législateurs.

De nombreuses communes, préfèrent rester "entre riches", allant même lors de constat de carence à payer des amendes qui pour certaines, s’élèvent à un millions d’euros (200 euros environ pour chaque logement qui manque), laissant aux autres le soin de résoudre les problèmes de mixité sociale.

D'autant plus inquiétant que le logement dit "social" l'est de moins en moins.

D’autres ont des difficultés géographiques, car il n’existe plus aucunes parcelles de terrains pour implanter quoi que ce soit…

Regrouper les familles pauvres, les étrangers, les chômeurs dans des quartiers périphériques à l'habitat dégradé et hautement dégradable a longtemps été un moyen sûr de ne pas voir les problèmes - payé d'une explosion sociale, de ci ou de là, de temps à autres.

Donc, une nouvelle loi devrait tenir compte de celles existantes sur le sujet faire une synthèse et éliminer les inutiles qui bien souvent se contredisent.

Et comment mettre fin à ces orgies législatives ?

Bien sûr, et singulièrement, par une loi, une de plus, mais ici en l’occurrence, une loi organique, qui rendrait obligatoire avant le vote de tout nouveau texte une évaluation de ce qui existe déjà.

Pour le moment et suite à l’action d’une association parisienne et au décès de l’insurgé de la bonté, il est de bon ton et politiquement correcte, pour des aspirants ou pour des élus chevronnés, de se draper dans les costumes de l’abbé Pierre, à l’orée des échéances électorales si proches.

Et pourquoi ne pas aller encore plus loin dans le cocasse en intégrant, la notion de rétroactivité.

Nous pourrions aller jusqu’à l’indemnisation des familles des victimes, mortes dans nos rues de solitude et d’indifférence…

Mais ici, et pour le public sans domicile, le problème est encore plus complexe, car la déstructuration psychologique et parfois physique est plus intense et nécessite un suivi plus assidu et de l’ordre du microchirurgicale si l’on veut résorber la misère en profondeur et définitivement.

Depuis 17 années, nous nous luttons pour être entendu par nos représentants, et la volonté des élus de tous bords d’organiser un maillage intercommunal qui assure l’hébergement de l’ensemble des SDF, fait toujours défaut.


Un parcours simple dans sa mise en place pourrait exister :

Tout d’abord, fédérer les associations et les structures sociales publiques locales, de l’agglomération et nationales, en une toile étroite et liée, en créant une banque d’informations accessible à tous les partenaires sociaux par le biais de l’Internet, permettant aux diverses structures d’avoir plus de connaissances sur ces partenaires, palliant dans un premier temps au manque de communication entre chacun, afin de répondre et de mieux orienter les besoins et les demandes des bénéficiaires.

Ensuite, pérenniser l’espoir et le lien social, en orientant les bénéficiaires des différents services vers d’autres structures de l’agglomération ou vers d’autres structures de villes de France, quand l’impossibilité de suivi s’opère dans une ville, pour des raisons d’organisation ou autres, afin de ne pas casser l’espoir créé entre un bénéficiaire et une structure d’aide, et garder tous les bénéfices liés au travail des différents partenaires associatifs ou publics.

Mais aussi et surtout, développer ce lien dans les communes d’agglomérations directes et rurales, car dans le processus de réinsertion, les petites communes, les villages sont des outils incontournables en direction du public que nous côtoyons. Même si une seule entité est accueillie dans une commune de grandeur quelconque, elle a toutes ses chances de retrouver l’harmonie et les cadres lui permettant de regagner un équilibre matériel et psychologique.

Les structures qui devront être créées dans les agglomérations devront osciller dans des effectifs entre 2 pour les plus petites communes et 10 pour les plus grandes.

Ces effectifs doivent être à échelle humaine, car il nous faut redonner à la notion d’action sociale ses lettres de noblesse.

Actuellement, le social lié aux personnes en grande précarité ne réside qu’à du gardiennage, à du parcage, de façon à cacher la misère sans vouloir réellement la résorber.

L’aspect qualitatif de ces structures sera atteint, car le personnel social aura matière et outils pour travailler dans de meilleures conditions. Les fameux irréductibles, que l’on classe irréductibles, parce que l’on n’a pas d’autres formes de structures à leur proposer, pourront trouver un lieu leur convenant de façon à progressivement se sortir de la rue.

L’aspect quantitatif sera également solutionné par le fait que chaque commune de France aura mis la pierre à l’édifice de l’hébergement d’urgence, en créant dans sa commune une structure en harmonie avec sa ville, multipliant les capacités d’accueil générales...

Cette phase est indispensable pour les plus déstructurés d’entre nous que nous appelons les SDF, car si l’on ne passe pas par ses paliers de décompressions sociaux, avant d’accéder au vrai logement, nous cacherons une fois de plus la misère sans la résorber et celle ci s'envenimera encore plus qu’elle ne l’est à l’heure actuelle.

Avec le milieu hospitalier, confronté en permanence et de plus en plus à ce problème, nous avons développé une idée simple, mais pourtant essentielle pour le bon fonctionnement des urgences et par conséquent de l’hôpital.

Elle concerne de plus ses partenaires institutionnels, la protection civile, ou encore les associatifs que nous sommes, dans l’action qui nous réunit tous en direction des plus défavorisés de nos concitoyens.

Un constat : Le réseau hospitalier, et donc l’hôpital, ne doit et ne peut exclure aucune frange de la population, quelle qu’elle soit et notamment celle qui est la plus démunie donc la plus fragile d’entre toutes, les SDF.

Un projet : Implanter un pôle amovible sur le site de l’hôpital afin de cibler les besoins et d’évaluer les demandes de cette population particulière dans le cadre d’une intervention transitoire à très court terme et non sédentaire, dans une projection à moyen ou à long terme.

Un Objectif : Limiter, voire supprimer le « parasitage » de l’accueil hospitalier par un public plus demandeur d’hébergement et de sécurité, que de soins. Ainsi les urgences de l’hôpital peuvent se concentrer uniquement sur leur mission de santé. Ce pôle pourrait définir si oui ou non il y a une nécessité de soins ou simplement un besoin de lien et d’accompagnement social.

Ce lieu de transit permettrait à des professionnels, comme à des étudiants en médecine ou autres formations du corps médical, de canaliser ce public vers une solution adaptée à leur demande du moment.

Ce projet s’inscrit pleinement dans la refonte des urgences et de son accueil et met à contribution non seulement des citoyens engagés mais aussi le milieu médical et notamment les étudiants qui seraient ainsi confrontés, au cours de leur formation, à un public en grande précarité.

A Grenoble, et avec le changement de direction, ce projet qui prenait forme avec son ancienne administration, est tombé dans les méandres obséquieux de certains oublis dédaigneux de ces souffrances isolées et marginales, et le problème n’est que toujours présent.

Et puis, tous simplement, on oublie cette formidable énergie et dynamique de « cette génération baby boumeuse », qui est devenu une formidable manne d’énergie citoyenne et bénévole pour l’implication dans ce quotidien, et dans ces actions de proximités…

Plus qu’une loi, ce sont en fait des comportements politiques donc citoyens qui doivent et qu’il nous faut changer.

Il y a des logiques de conduites qui ne nécessitent pas d’être imprimés dans des tablettes en lettre de feux pour pallier à la solidarité nationale en direction des plus défavorisés d’entre nous.

Pour progresser, il ne suffit pas de vouloir agir, il faut d'abord savoir dans quel sens agir, et la fraternité toute républicaine qui incarne chaque citoyen, doit devenir ce formidable élan entre le faisable et le réalisé.

Commentaires

1. Le dimanche 27 mai 2007, à 22 h 15 par Michel R.

Merci pour ce grand moment de partage, de pragmatisme et d'émotion.

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